Chère Poésie,

Un matin, il y a quelques jours, tu m’as demandé ce que j’attendais de toi.
Difficile à cette heure si matinale de « mettre les mains dans le cambouis » et de te répondre. J’ai bien vu que sous tes airs de douceur tu avais des impatiences de Diva tant tu as deviné que ma réponse se ferait longuement attendre.
Vois-tu ma très chère Poésie, il m’a fallu un peu d'espace et les matins d'après pour essayer de formuler au plus juste mes pensées, tenter une réponse, qui une fois écrite sera surement comme un vulgaire palimpseste qui s’envolera au vent. Aucune importance.Tu sais par cœur mes silences. Qui en disent long. De toi. De moi. Je crois que l'on s'aime. Souvent. Toujours. D'un amour ancien si contemporain.
Et puis tu sais comme je suis parfois bavarde, voir dissipée, aussi, cette réponse est encore bien incomplète, tant il y a à dire. Je doute de tout. Souvent. Sans cesse j'attends de toi des preuves.
Je t’ai rencontré par hasard, au temps de mes quinze ans. C’était un après-midi, en plein hiver. Depuis je ne t’ai plus quitté. Notre fugue se prolonge. Selon les jours et les humeurs qui traversent ma vie fragile et compliquée, ma présence près de toi varie.
Ce matin par exemple, je t’en voulais. De tes échecs à transformer le monde. De raconter des tas histoires, toutes parfois plus folles les unes que les autres. Cette facilité que tu as à décrire nos erreurs, nos impasses, nos amours, nos bonheurs, nos peines, nos joies, notre nature, nos vies, la vie, ma vie. Cette insolence que tu as d’imaginer nos avenirs quand ce n’est pas de transformer nos souvenirs. Que dire des instants que tu fais si présents. Et qui me bouleversent. Il m'arrive de rêver d’une Poésie libérée de toute contrainte. Je souhaite que tu m’empêches de me satisfaire d’être seule à seule avec toi et que tu m’obliges à regarder le monde et ses saveurs incroyables et infinies. J'aime bien aussi quand tu frôles mon cœur. Que tout tangue. Et bien plus encore. Assoiffée que je suis. Tu t'en rapproches parfois. Et tu t'éloignes aussi. Et puis j'aime quand tu es celle-là  qui m’émerveille. Quand tu doutes. C'est alors que tu résonnes en moi. Mon écho, ma sœur. J'aspire aux silences que tu m'offres. Ces instants de reculs indispensables.
Dès hier j’attendais tout de toi. Un rendez-vous comme une perpétuelle invitation, là et te lire. T'écrire. Essayer encore et malgré tout. Que tu m’emmènes en voyage. Que j’y lise ce qui me fait et me défait. C’est avec toi que mes pensées s’évadent, bondissent, s’augmentent, tâtonnent, résonnent et accueillent. Cette énergie qui m’est indissociable. Chaque fois que mes yeux se posent sur toi, j’espère.
Demain encore je serai là.
Je m’y retrouve toujours. Mon ancre. Toi seule. Tu sais ma fidélité. Ma constance, nos familiarités, nos disputes, nos réconciliations, nos fragilités, notre intimité. Tu es ce lieu qui me rassemble.
Une grâce qui préserve des bruits du monde.
Tu me raconteras la vie. Un hymne. En honorant l’humain.

Texte et Photo M@claire© Droits Réservés


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