Nous sommes combien ? 
Elle est combien mon amie croisée hier, encerclée par la solitude ? 
Elle est digne, elle est belle.
La cinquantaine qui frappe à la porte. 
Noyée par le temps qui va trop vite. 
Toujours un sourire à fleur de lèvres. Souvent élégante. 
Un sillage parfumé devance sa présence. 
Elle est là. 
Des yeux pétillants. Noisettes, parfois affolés de ce flot de paroles trop longtemps retenues. 
Est-ce d’avoir trop pleuré qu’ils sont souvent tant humides ?
Parfois dans sa voix quand elle me parle de sa vie, là, si proche de la mienne, de la tienne peut-être, des nôtres surement. 
Je sais bien que ça tangue. 
J’ai parcouru tant de ces marches si semblables. 
Elle me raconte son enfant, cette adolescente qui a poussé dans la rupture. Et qui en reste là, fragile, coincée, entre une mère courage et un père brillamment absent qui claque sa vie dans le futile. Et qui a oublié d’ouvrir son cœur à son enfant. 
Et cet autre fils qui vit loin en oubliant qu’il a une mère, dans un silence assourdissant. 
Elle est combien mon amie, qui jongle avec la vie pour joindre les deux bouts ? 
Elle qui dispense tout son amour de mère, elle en a oublié de faire une place à l’autre. 
Qui ne viendra pas pour le moment. Parce qu’elle ne voit pas comment une telle solitude puisse accueillir l’amour. Elle n'a pas le temps. Elle n'a pas l'espace. Dans sa tête, dans son cœur. Elle ne sait plus. 
Mère courage, femme moderne. Elle est si douce mon amie. Drapée dans toute sa dignité. 
Elle est combien mon amie qui égrène en vrac dans le silence respectueux de mon salon, lumière tamisée, tous ses chagrins, ses inquiétudes, ses joies parfois, la tête doucement inclinée ? 
Elle est si forte. Avons-nous le choix. 
Elle ma « sœur » d’armes et c’est une veillée de partage dans la bienveillance que nous nous sommes offertes. Au loin dans la nuit, elle a remonté le col de son manteau. 
Soulagée de tant de mots déposés. 
Elle est repartie dans la pluie. 
Je crois que ses yeux se sont un peu délavés. 
Quand je l'ai prise dans mes bras pour nous rassurer.
J'ai mis du temps à m'endormir.
Ce matin c’est dimanche. 
Il fait silence.
Je suis seule. 
Il y a trop longtemps que je ne dépose qu’une tasse à café sur la table. 

Texte M@laire© Droits Réservés


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